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« Va faire reluire ton flingue, Renaldo ! » (George)
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PLUME DE FAN : LE TEMPLE DE D�SHARA

Chapitre 1 : Disparue.

Paris, par une belle journ�e d'automne. Mais pour moi, cette journ�e n'a plus rien d'agr�able, contrairement � ce que je pensais encore il y a quelques heures. Me voil�, moi, George Stobbart, en train de contempler la Seine du haut de la berge du fleuve. Qu'avait-il bien pu se passer pour que j'en arrive l� ? Qu'est-il advenu de mon amie, Nicole Collard ? O� donc se trouve-t-elle ? Je n'en ai pas la moindre id�e... Et pourtant, il faut que je la retrouve au plus vite, avant qu'il ne se passe quelque chose de pire !
Bon, r�capitulons : premi�rement, je suis assis � la terrasse du Caf� de La Chandelle Verte, en attendant que la serveuse m'apporte un croissant accompagn� d'un jus d'orange. L�, je re�ois un coup de t�l�phone sur mon portable, lequel m'indique qu'il vient de Nico, mon amie journaliste. Je d�croche. Et voil� que la voix de Nico pousse un cri qui traverse mon cerveau de part en part. Stup�faction suivie d'incompr�hension, je me h�te de quitter le Caf� et de h�ler un taxi :
- Eh ! S'il-vous pla�t !
- Oui ? O� puis-je vous emmener, monsieur ?
( le type sent l'alcool � plein nez mais je n'ai pas le choix, tant pis pour les ivrognes )
- 361 Rue Jarry, je vous prie.
- Aucun probl�me, monsieur. Montez !
- Merci.
Le trajet me semble interminable alors que le chauffeur, quasi dans les pommes, ne cesse de me parler :
- Dites, monsieur, comment vous appelez-vous ?
- George Stobbart. Avec deux � b � et deux � t �.
- Ah , vous �tes am�ricain .
- Exact . Californien , pour tout vous dire .
- Chouette coin , la Californie , il para�t... et que faites-vous � Paris , monsieur Stobbart ? Du tourisme ?
- Non , pas vraiment . Juste revoir une amie de longue date .
- Ah...
Je pousse un immense soupir de soulagement lorsque , sur le pas de l'immeuble de Nico , je regarde le taxi s'�loigner en crissant les pneus ; �a m'apprendra � monter dans la voiture du premier chauffeur venu . Je gravis les marches de l'escalier quatre � quatre , m'attendant au pire...
Je contemple le triste spectacle , sans cadavre toutefois , c'est d�j� �a : meubles renvers�s , papiers de toute sorte jonchant le parquet , lit et canap� lac�r�s � coups de couteau... et nulle trace de Nico .
Lentement , je fouille les d�combres pour finalement trouver deux choses : une petite bourse en cuir , accroch�e � une mince tresse d'or , que je d�cidai de ne pas ouvrir pour le moment , et un mot de la main de Nico , � mon intention . Il y est �crit : � Johan Observait , Rigide , D�serts Arides , Nues Inexistantes Enfuies . 1812 . � Je n'y comprends rien , en cons�quence de quoi je quitte l'appartement en charpie d'un pas las , pour me retrouver ici , en bord de Seine , perdu dans mes pens�es de plus en plus floues .

Chapitre 2 : Le message et l'anneau.

� Johan Observait , Rigide , D�serts Arides , Nues Inexistantes Enfuies . 1812 . � . Qu'est-ce que cela peut bien signifier ? Car il y a obligatoirement un sens � ce message . Mais lequel ? Qui pouvait �tre ce Johan , pourquoi regardait-il les d�serts arides et , surtout , pourquoi forc�ment en 1812 ? Quel casse-t�te... Je dois bien me rendre � l'�vidence , j'ai besoin d'une aide ext�rieure . Seulement , en ce qui concerne la seule personne me venant � l'esprit , je n'�prouve pas une tr�s grande envie de la revoir . Ceci dit , je n'ai pas vraiment le choix . Andr� Lobineau , alias l'historien � la queue de cheval , �tait devenu expert en manuscrits anciens apr�s des �tudes d'Histoire durant lesquelles il avait fait la connaissance de Nico . L'unique endroit o� je puisse esp�rer le trouver , c'est au mus�e Crune : il y passe le plus clair de son temps libre , toujours � �tudier des sceaux ou un quelconque vase �trusque . Une perte de temps cependant justifi�e , � mon go�t . Apr�s tout , � chacun ses passions . Je d�tache donc mes yeux du fleuve parisien et me dirige vers le mus�e . Sur place , le gardien m'accueille avec un grand sourire tout en bombant le torse pour bien me prouver que son uniforme ne comporte pas la moindre tache de poussi�re . Comme pr�vu , Andr� est l� . Je m'approche de lui et l'interpelle brusquement pour le sortir de ses pens�es :
- Salut , Andr� !
- Tiens , Georgie... que fais-tu ici ?
- J'ai besoin de ton aide... et ne vas pas t'imaginer que je dise �a pour te flatter .
- Ben voyons ! Comme si tu pouvais �viter les ennuis pendant plus de cinq minutes...
- Andr� , Nico a �t� enlev�e .
- Comment ?!? Tu te moques de moi ?
- Non . Mais elle m'a laiss� ce message .
Je le lui tends afin qu'il puisse le lire .
- � Johan Observait , Rigide , D�serts Arides , Nues Inexistantes Enfuies . 1812 . �... George , je suis d�sol� , mais je n'ai pas la moindre id�e de ce que cela peut signifier . Il n'y avait rien d'autre ?
- Si . Il y avait �a .
Je sors de ma poche la petite bourse en cuir que je n'ai toujours pas ouverte et la montre � Andr� qui la regarde d'un air perplexe :
- Sais-tu ce qu'il y a � l'int�rieur ?
- Non . Je l'ai mise dans la poche de mon jean lorsque je l'ai trouv�e et ne l'en ai pas sortie jusqu'� maintenant .
- Dans ce cas , c'est le moment de l'ouvrir , George .
Je m'ex�cute , les doigts tremblants , et attrape quelque chose de solide . C'est un anneau d'or , tel que je n'en ai encore jamais vu : large d'un demi pouce , cisel� tout autour , il porte en son centre deux pierres jumelles , �galement scintillantes . L'une , d'un rouge �clatant , est incrust�e d'une croix d'argent tandis que l'autre , verte �meraude , porte un croissant de lune .
Andr� para�t comme foudroy� par la surprise :
- George , l� , nous avons une piste .
- Laquelle ?
- Le croissant de lune sur fond vert , George... Le croissant de l'Islam . Tout ce que je peux t'affirmer avec certitude , c'est qu'il y a donc un rapport avec le Proche-Orient .
- Le Proche-Orient ? Tu veux dire les pays dans la zone de la Syrie , de l'Iraq , de la Jordanie ?
- Exactement .
- Attends une minute ! � Jordanie � ? C'est �a , Andr� ! En Jordanie !
- Je ne te comprends pas . O� veux-tu en venir ?
- Regarde le message : chacun des mots le composant commence par une majuscule . Relies-les entre elles de gauche � droite , que lis-tu maintenant ?
- � JORDANIE . 1812 . �...
- Andr� , que s'est-il pass� l�-bas en cette ann�e ?
- Je n'en sais strictement rien , George . Je suis d�sol� . Mais je connais quelqu'un qui pourrait peut-�tre t'aider , un expert en tout ce qui concerne l'Histoire du Proche-Orient...Tiens , quand on parle du loup , le voil� .
Il me montre un homme d'�ge m�r , imposant , mais dans ses yeux , je d�c�le une indicible m�lancolie . Il semble avoir remarqu� que nous parlions de lui car il se dirige vers nous d'un pas d�cid� et s'adresse � Andr� :
- Monsieur Lobineau , par quel hasard vous trouvez-vous ici ?
- Eh bien , je suppose qu'il s'agit du m�me hasard que celui par lequel vous vous trouvez vous-m�me ici , Monsieur Ludwig Burckhardt . En fait , nous voulions justement vous voir .
- Ah ? Et pourquoi , je vous prie ?
Je prends le relais de la conversation :
- Nous avons besoin de votre aide , Monsieur Burckhardt , pour retrouver une amie , Nicole Collard , qui a �t� enlev�e . Il semblerait qu'elle se trouve actuellement en Jordanie , mais nous ne savons pas o� .
- Comment voulez-vous que je le sache ? Je ne suis pas un devin !
- Bien s�r , mais pourriez-vous r�pondre � une question ?
- Posez-la toujours...
- S'est-il pass� quelque chose d'important en Jordanie , en 1812 ?
- Plusieurs , Monsieur ... ?
- Stobbart . George Stobbart . Plusieurs , dites-vous ? Mais encore ?
- Si vous ne me donnez pas plus de pr�cisions , Monsieur Stobbart , je ne pourrais pas vous aider davantage .
- Hmmm... Avez-vous entendu parler d'un certain Johan , en cette ann�e ?
Brusquement , son visage p�lit jusqu'� devenir blanc comme un linge . Je me pr�cipite vers lui alors qu'il tombe tel une pierre sur le plancher , inconscient :
- Monsieur Burckhardt ! R�veillez -vous !
- Que s'est-il pass� ? Que m'est-il arriv� ?
- Vous vous �tes �vanoui lorsque je vous ai demand� si vous aviez d�j� entendu parler d'un certain Johan , en Jordanie , en 1812 .
- Ah oui...En effet , Monsieur Stobbart , je sais de qui il s'agit . En fait , je descends de lui , voyez-vous . Imaginez ma surprise lorsque je vous ai entendu prononcer son nom... En 1812 , c'est bien cela ?
- Tout � fait .
- Johan Ludwig Burckhardt fut reconnu par les explorateurs du monde entier lorsqu'en 1812 , il retrouva une fabuleuse et envo�tante cit� dissimul�e dans un massif montagneux du d�sert de Jordanie . Elle est aujourd'hui connue sous le nom de � P�tra la rose � .
- � P�tra la rose � ?!?
Je sens une panique soudaine m'envahir ; Petra avait beau �tre le nom de cette pr�tendue cit� enfouie , il �tait �galement celui d'une meurtri�re auquel Nico et moi avions d�j� eu affaire... (blonde , par ailleurs)
- Oui .
- Que pouvez-vous me dire d'autre ?
- Peupl�e par la tribu arabe des Nabat�ens , P�tra est une cit� caravani�re fort prosp�re qui assure le commerce entre l'Arabie et la M�diterran�e . Elle atteint son apog�e entre la fin du premier si�cle avant notre �re et le commencement du deuxi�me si�cle de notre �re . C'est � cette �poque qu'elle creuse dans ses falaises de gr�s rose ses plus beaux monuments . La ville n'est accessible que par une gorge , �troite et sinueuse , appel�e le S�q , qui s'�tend sur plus d'un kilom�tre et ne d�passe pas deux m�tres de large par endroits . P�tra est truff�e de tombeaux dont le plus magnifique se nomme le Khazn� . Mais malgr� cela , P�tra est bien loin d'�tre une n�cropole : c'est une ville � part enti�re . Elle poss�de ses boutiques , et ses �difices publics - th��tres , bains , fontaines - construits dans un large cirque .
- Comment se comportaient les Nabat�ens ?
- P�tra est le centre d'une intense vie religieuse : les pr�tres y honorent les dieux dans des temples . Le sanctuaire principal est consacr� � D�shara , le dieu dynastique et national , ador� sous la forme d'un b�tyle , ou pierre sacr�e non d�cor�e , constituant l'habitacle du dieu . Les rites consistent � lui pr�senter des sacrifices d'animaux et � l'asperger de sang . Maintenant , d'apr�s la l�gende , certains Nabat�ens , durant une p�riode pr�cise de l'ann�e d�finie dans le plus grand secret , proc�daient � des sacrifices humains... mais aucune preuve n'a pu �tre �tablie .
- Je trouve �a plut�t logique : si tout cela a ne serait-ce qu'une parcelle de v�rit� , il n'allaient quand m�me crier � la ronde qu'ils tuaient des humains , vous ne croyez pas ?
- Monsieur Stobbart , pensez-vous r�ellement que le peuple des Nabat�ens ait pu proc�der � ce type de sacrifices alors qu'ils ont construit la prodigieuse cit� de P�tra ?
- Les Mayas aussi faisaient partie d'une civilisation brillante . Ce qui ne les a pas emp�ch�s de sacrifier hommes , femmes , enfants � leur dieu Tezcalipoca . D'autre part , les morts ne parlent pas et l'habit ne fait pas le moine . Cependant , je vous remercie , vous m'avez �t� d'une aide pr�cieuse .
- Que comptez-vous faire ?
- Je vais me rendre en Jordanie , dans le d�sert , et retrouver Nico . A moins que je ne me trompe , je suis quasiment certain qu'elle se trouve � P�tra . Encore merci pour votre aide .
Je me dirige vers la sortie du mus�e lorsque , tout � coup :
- George !
Andr� me fait signe de l'attendre , haletant apr�s deux m�tres de course . Je m'impatiente :
- Qu'est-ce que tu veux ?
- George , je t'accompagne en Jordanie .
- Pardon ?Il n'en est pas question , Andr� !
- Et comment feras-tu pour retrouver Nico sans moi ? Je suis le seul � pouvoir te fournir un bon argument d'aller � P�tra car , vois-tu , c'est un site arch�ologique . Et en cette qualit� , seule une personne poss�dant un permis de fouilles , comme moi , est en droit de s'y rendre . Tu n'as pas appris �a ,durant tes �tudes de droit ?
- Et toi , as-tu la moindre id�e de la mani�re dont il faut r�diger un brevet , dans le cadre de la propri�t� industrielle ?
- Non .
- Alors , tais-toi ! C'est bon , tu viens avec moi mais je te pr�viens : on a int�r�t � se serrer les coudes si l'on veut retrouver Nico , c'est compris ?
- C'est compris .
- Parfait . Pr�pare tes valises , nous partons pour la Jordanie dans trois heures . Rendez-vous dans la salle d'embarquement .

Chapitre 3 : Bienvenue en Jordanie.

- � Mesdames et messieurs , nous venons d'atterrir � Amman et nous esp�rons que vous avez pass� un agr�able vol en notre compagnie . Nous vous souhaitons un agr�able s�jour en Jordanie . �
La voix off du commandant de bord me vrille les tympans alors que je me r�veille difficilement . Dormir �tait , me semblait-il , le meilleur moyen d'�viter toute conversation avec Andr� . Hors de l'appareil , la temp�rature est pour le moins �touffante , ce qui nous am�ne tous deux � retirer nos pulls , id�aux pour la France mais d'aucune utilit� ici . Nous sortons de l'a�roport en silence et cherchons un taxi , chacun de son c�t� ; Andr� s'av�re �tre le premier � en d�nicher un . Nous embarquons .
- Bien le bonjour , mes amis touristes . O� donc aurais-je l'immense honneur de vous emmener , pour votre plus grand plaisir ?
Regards r�ciproques entre Andr� et moi :
- Eh bien , Andr� , tu as perdu ta langue ? Monsieur t'a pos� une question , il me semble .
- Pourquoi devrais-je lui r�pondre ? Pourquoi pas toi ?
- Parce que TU l'as appel� , pas moi . Ensuite , parce qu'il est grand temps pour toi d'apprendre la communication avec les autres , et enfin parce que sans moi , tu ne serais pas l� .
L'�rudit en manuscrits anciens me jette un regard noir auquel je r�ponds par un sourire amus� et satisfait . En cons�quence de quoi il s'adresse au chauffeur du � taxi � :
- Nous voudrions nous rendre � P�tra . Pourriez-vous nous y emmener ?
- Non , je le regrette , mon ami touriste . En revanche , je peux vous conduire � la lisi�re du d�sert o� l'un de mes fr�res se fera un plaisir de vous administrer des moyens de locomotion plus appropri�s et de vous servir de guide pour aller � la cit� rose .
Ce qui , en gros , se traduisait par : pr�parez votre portefeuille , vous allez en avoir besoin . J'encha�ne :
- Tr�s bien . Allons-y !

Chapitre 4 : Sheitan , Safran , pr�paratifs et talents de cavalier.

Apr�s une interminable route en taxi , lequel taxi nous a plong�s dans une v�ritable torpeur tant la temp�rature est �lev�e , nous arrivons � l'endroit indiqu� : une sorte de ferme miniature se composant d'un point d'eau pour les b�tes , d'un enclos en bois , d'une maisonnette et d'un vieil hangar . Une foule d'enfants se groupe autour de nous alors que nous venons � peine de descendre du v�hicule qui lui-m�me semble n'en plus pouvoir . Ils ne voient probablement pas souvent des �trangers s'aventurer chez eux .
Omar , le chauffeur , se pr�cipite pour embrasser un homme d'une trentaine d'ann�es , sans doute son fr�re . Affirmatif . Il nous fait signe de le rejoindre et , imm�diatement , la discussion s'installe entre lui et moi :
- Venez , mes amis , approchez ! Omar vient de me raconter ce qui vous am�ne ici . Ce serait un grand privil�ge pour moi que de vous guider jusqu'� la cit� rose .
- Fort bien , mais comment nous y rendrons-nous ?
- Premi�rement , l'un de vous deux poss�de-il un permis de fouilles ?
- Oui , mon � compagnon � .
- Une bonne chose de r�gl�e . Comment vous nommez-vous ?
- Lui , Andr� Lobineau , moi , George Stobbart . Et vous ?
- Mohamed . Votre ami n'a pas de langue ?
- Oh , si . Il �prouve seulement quelques difficult�s d'�locution et de communication . Vous savez , � force de ne vivre que dans le pass�...
- Oui , en effet . Suivez-moi , je vais vous montrer vos montures respectives .
- Nos... quoi ?
- Vos montures , George . A moins que vous ne pr�f�riez marcher � pied ?
- Pas vraiment , merci .
Mohamed nous entra�ne vers l'enclos et nous d�signe deux magnifiques chevaux , de v�ritables oeuvres d'art . Robustes , ils l�vent leurs t�tes vers nous en fr�missant des naseaux avant de nous rejoindre , piqu�s par la curiosit� . L'un poss�de une robe couleur caf� au lait , l'autre est d'un noir de jais hormis l'�toile blanche qu'il porte sur le front .
- Le caf� au lait , nous annonce Mohamed , se nomme Safran . Il est pour vous , monsieur Lobineau .
Andr� semble parfaitement horrifi� autant qu'incr�dule ; je n'ai jamais eu tant de mal � me retenir d '�clater de rire .
- George , vous monterez Sheitan , le noir .
- J'en suis ravi . Que signifie ce nom ?
- � Diable �... Mais c'est un v�ritable prince du d�sert . Je pense que vous vous entendrez bien , tous les deux . Savez-vous monter � cheval ?
- Moi , oui . Andr� ?
- Non , justement . Je ne pourrai jamais tenir sur le dos de cet animal .
- Tant mieux . Euh... je veux dire...Mohamed , que pouvons-nous faire ?
- Rien de plus simple : nous vous attacherons , monsieur Lobineau , gr�ce � une corde � la selle de Safran . Ainsi , vous ne pourrez pas tomber . Mais avant toute chose , il vous faut d'autres v�tements . Suivez-moi .
Nous nous d�p�trons donc tant bien que mal de nos v�tements � europ�ens � et commen�ons � nous rev�tir d'habits semblables � ceux que portent les touaregs , les habitants du d�sert . Une sacr�e transformation mais qui n'est pas pour me d�plaire , il faut �tre franc . Andr� , en revanche , a l'air parfaitement ridicule . Je ne manque pas de le lui faire remarquer ce qui me vaut une v�ritable fusillade du regard . Qu'importe , ce n'est pas comme �a qu'il se d�barrassera de moi . Pendant ce temps , Mohamed a pr�par� les chevaux et les provisions n�cessaires � la route que nous sommes sur le point de commencer . Notre guide se met en selle avec l�g�ret� , j'enfourche Sheitan et l'un des enfants se met en qu�te d'attacher Andr� � Safran � l'aide d'une mince corde . Sit�t fait , Mohamed prend la parole :
- Si nous prenons le d�part maintenant , nous arriverons demain matin � P�tra . Laissez vos chevaux galoper s'ils le souhaitent , ils connaissent le chemin sans doute mieux que moi-m�me . George ?
- Entendu . Je suis pr�t .
Nous donnons de brefs coups de talons dans les flancs de nos chevaux ; le r�sultat ne se fait pas attendre : nous galopons � toute vitesse � travers le d�sert , le front happ� par le vent . Une libert� parfaite ! Une libert� tellement grisante que j'en oublie mon inqui�tude pour Nico .
- Eh ! Attendez-moi !
Je me retourne et laisse �clater mon rire que j'ai trop longtemps contenu : Andr� n'est pas encore tomb� de cheval mais c'est tout juste s'il arrive � tenir les r�nes de sa monture . Safran a de toute �vidence compris que son cavalier n'a aucune exp�rience et compte bien en profiter . Je lance � l'historien :
- Eh bien , Andr� ? Tu as le feu aux trousses ?
- Tr�s dr�le ! Tu ne serais pas capable de le maintenir en place si tu le montais !
- Je n'en serais pas si s�r , � ta place . Regarde , nous faisons route dos au soleil . Si tu �tais un tant soit peu plus perspicace , tu aurais compris que Safran est effray� par son ombre . Si tu veux le calmer , tu n'as qu'� rabattre le cache du filet sur ses yeux . Un cheval qui ne voit pas ralentit , c'est bien connu . Enfin , pas pour toi , apparemment .
Andr� d�cide de suivre mon conseil et cache les yeux de Safran , lequel ralentit aussit�t . L'�rudit me regarde avec soulagement :
- Je suis certain qu'un jour je le regretterai mais... merci , George .

Chapitre 5 : la l�gende de l'anneau.

La nuit s'est abattue sur nous , nous d�voilant un superbe firmament . Andr� dort d�j� � points ferm�s sous la tente de notre campement mais moi , je ne parviens pas � m'endormir . Durant toute la chevauch�e de l'apr�s-midi , au fur et � mesure que nous approchions de P�tra , l'inqui�tude recommen�ait � me serrer la gorge et elle n'a fait que s'accentuer avec la fin du jour . Je tiens maintenant entre mes doigts l'�trange anneau trouv� � Paris et le fait briller � la lueur du feu de camp . Son �clat d'or calme un peu mon esprit angoiss� . Lorsque brusquement , un bruit de pas dans mon dos me fait sursauter : Mohamed s'avance lentement vers moi . Je ne pourrai jamais dire pourquoi mais j'avais confiance en lui . Il me d�visage un instant puis me demande :
- Vous ne pouvez pas dormir ?
- Non . Et vous ?
- Je suis un fils du d�sert et je ne me lasse pas d'observer le ciel nocturne . Toutes les constellations possibles et imaginables sont visibles ici . Les �toiles me guident , George . Ce sont elles qui me racontent les histoires ancestrales qui nourrissent mon esprit . L'histoire de ce monde depuis la nuit des temps est enfouie en ces lieux . Votre ami ne croit qu'� ce qu'il voit mais vous ,non . Cela se lit sur votre visage .
- Andr� n'est pas mon ami . Il est ici parce qu'il poss�de un permis de fouilles sans lequel nous ne pourrions pas p�n�trer dans l'enceinte de P�tra . Sinon , je n'aurai jamais accept� qu'il m'accompagne , croyez-le bien .
- Ah , ah ! Je comprends mieux votre ironie � propos de sa mani�re de monter � cheval . Je vais vous raconter une petite histoire , mon ami . Ecoutez bien...
Je me laisse envelopper par sa voix en regardant les �toiles : c'est bien vrai qu'elles ont l'air de contenir des millions d'histoires . Elles me transportent loin d'ici , apaisent mon esprit . Mohamed commence :
� Il y a bien longtemps , un homme vivait heureux dans un campement du d�sert . Entre lui , la nature et les siens r�gnait une parfaite harmonie . Un jour , l'homme �tait all� conduire le troupeau de b�tail au point d'eau pour qu'elles puissent s'abreuver et se nourrir d'herbe fra�che . Alors qu'il remplissait son outre de l'�l�ment liquide vital , l'une des b�tes fut prise dans un brusque tourbillon qui l'attira au fond de l'eau . Alors une voix se fit entendre , une voix merveilleuse qui disait � l'homme : � Je t'ai pris une b�te pour me nourrir , j'en suis conscient . Pour te d�dommager , je t'offrirais ce que tu voudras , je t'en donne ma parole . Mais attention , tout ce que tu demanderas et que tu obtiendras de moi , ton voisin le poss�dera �galement . R�fl�chis bien . � Alors l'homme se mit � songer . Il se disait qu'il pourrait demander tout l'or du monde ou alors les plus belles femmes . Mais chaque fois le m�me probl�me le retenait de formuler sa demande : sa cupidit� . Il ne pouvait se r�soudre � accepter d'offrir ce qu'il d�sirait � son voisin . Puis , il s'adressa � la voix et formula son souhait : � Puisque mon voisin aura tout ce que j'ai , et que je ne peux rien faire pour l'emp�cher , alors cr�ve-moi un oeil ! � .
Mohamed me regarde avec bienveillance , attendant mon avis et mes r�flexions :
- Elle est bien , ton histoire , Mohamed . C'est une belle morale ainsi qu'une belle sentence . Mais pourquoi ne pas l'avoir racont�e � un moment o� Andr� aurait pu l'entendre ?
- Il n'y aurait pas pr�t� d'attention . Je lis une grande inqui�tude dans vos yeux , George . Ce n'est pas la cit� rose qui vous attire ici , il y a une autre raison , n'est-ce pas ? Que recherchez-vous ?
- Une de mes amies , Nico , a �t� enlev�e . Je pense qu'elle se trouve � P�tra .
- Qu'est-ce qui vous fait croire cela ?
- Un message et cet anneau . L'avez-vous d�j� vu ?
Je le lui tends afin qu'il puisse l'examiner . C'est alors qu'il s'exclame :
- L'Anneau de Salim ! L'Anneau disparu ! Comment en �tes-vous entr� en possession ?
- Je l'ai trouv� � Paris . Qu'a-t-il de si particulier ?
- L'Anneau de Salim a plusieurs particularit�s mais la plus importante d'entre elles consiste dans le fait que , de nos jours , seul un homme serait en droit de le passer � son doigt sans qu'il le br�le . L'Anneau est tr�s ancien , il date du temps sombre des croisades . Il symbolise une union pour le moins particuli�re � cette �poque .
- Quelle union ?
- C'est une longue et belle histoire . Bertrand de Beauce , un Templier , combattait en Terre Sainte depuis d�j� deux ans et Salim n'�tait encore qu'un chef musulman , jeune et valeureux certes , mais loin d'avoir la renomm�e qu'il eut par la suite . Un jour , Bertrand attaqua par surprise un campement . Les hommes du campement se d�fendirent avec courage mais les chevaliers du Temple l'emport�rent et ils firent prisonniers leurs ennemis . Parmi les nombreux captifs , Bertrand aper�ut une jeune femme qui venait juste d'accoucher d'un fils . Son allure , ses v�tements richement brod�s , ses bijoux prouvaient qu'elle �tait de haute naissance et l'�pouse d'un chef important . Bertrand aurait pu , comme il �tait d'usage , l'emmener pour en tirer une ran�on mais il n'en fit rien . Au contraire , il ordonna qu'on les lib�re , elle et son enfant , qu'on installe une tente pour l'abriter , qu'on lui rende ses servantes et m�me qu'on lui donne une chamelle pour allaiter le nouveau-n� . Or cette femme �tait l'�pouse de Salim et l'enfant , son premier-n� . A l'annonce de l'attaque du campement , il accourut , d�sesp�r� et s'attendant au pire . Il les retrouva ainsi que je viens de vous dire , alors il jura une gratitude �ternelle au chevalier qui avait respect� sa femme et son fils . Il fit faire cet anneau et envoya un messager l'apporter � Bertrand de Beauce . Celui-ci fut touch� et porta d�sormais la bague , de jour comme de nuit . Mais un jour il fut pris dans une embuscade o� il perdit la vie en m�me temps que sa femme et son fils , n� d'un mois � peine et l'Anneau ne fut pas retrouv� . Et Salim en ressentit tant de col�re qu'il jura de retrouver ces hommes , plus brigands que soldats , et de les exterminer � son tour pour leur faire payer ce crime...
- Y parvint-il ?
- Je ne le sais pas , George . Personne ne le sait . Imaginez ma surprise lorsque vous m'avez montr� l'Anneau ! Vous comprenez maintenant ce que symbolisent les deux pierres ? La rouge orn�e de la croix d'argent repr�sente Bertrand et la verte Salim . Mais quoi qu'il en soit , il est temps de dormir , mon ami . Oubliez le temps d'une nuit ce que je viens de vous raconter � l'aide des �toiles et reposez-vous . Nous avons encore de la route � faire .

Chapitre 6 : P�tra la rose.

Je galope sur Sheitan, cheveux au vent, en direction de P�tra. Aucun son ne se fait entendre hormis le mart�lement des sabots de l'�talon lanc� dans sa course. Rien ne pourra m'arr�ter, je retrouverai Nico. Droit devant moi, le S�q s'�tend, de plus en plus �troit. Je laisse donc Sheitan et m'avance � pied entre les deux parois de pierre de la gorge, d�serte, d�laiss�e par toute pr�sence humaine. Toujours pas le moindre bruit lorsque soudain, un d�clic se fait entendre derri�re moi ! Je me retourne pour voir, braqu� sur mon torse, le canon b�ant d'un revolver...Celui qui le tient a le visage dissimul� par une capuche et son doigt se crispe sur la g�chette :
- Adieu, Stobbart ! Bon voyage en enfer !
La balle part dans une d�tonation qui retentit dans tout le S�q et cherche � se ficher dans mon coeur. Je pousse un dernier cri ; je sais que c'est la fin , autour de moi, il n'y a plus que t�n�bres :
- Noooon !
- George ! George , r�veillez-vous !
-... Mohamed ?
- Vous avez fait un mauvais r�ve . Levez-vous , il est temps de partir d'ici . Andr� Lobineau est all� chercher Sheitan et Safran mais je doute qu'il parvienne � les ramener ici .
Je pousse une profonde inspiration alors que notre guide s'�loigne. Je reste seul de longues minutes et c'est heureux car j'�prouve un certain mal � chasser ce cauchemar de ma t�te... Un hennissement me tire hors de mes r�flexions , celui de Sheitan ; Mohamed et Andr� m'attendent,mon cheval aussi . Je monte rapidement en selle et nous nous dirigeons tous trois vers P�tra bien que le soleil nous fasse d�j� courber la t�te . Je me mure dans le silence lorsque le S�q appara�t : selon Mohamed, les esprits des anciens Nabat�ens y reposent et surveillent avec vigilance l'acc�s � leur cit�. A l'entr�e de la gorge,une sorte de p�le imitation de garde nous barre la route :
- Hol� ! Vous ne pouvez p�n�trer ici que si vous �tes en possession d'un permis de fouilles . En avez-vous un ?
- Oui, j'en ai un . d�clare Andr� . Voici mon assistant, George Stobbart . Comment �a, son assistant ?!? Pour qui se prend-il donc ?
- Tr�s bien. Passez.
Mohamed nous explique qu'il n'a pas la permission d'entrer dans la ville morte et qu'il nous attendra donc ici. Nous mettons pied � terre et commen�ons de traverser le S�q, en silence .Je ne me sens pas � mon aise, j'ai l'impression d'�tre observ�. Je m'oblige � fixer mon regard sur les parois de la gorge tout en tendant l'oreille, attentif au moindre bruit.
- George...
- Qu'est-ce qu'il y a encore , Andr�? Tu ne voudrais pas te taire juste un moment ?
- George...
Voil� qu'il devient muet maintenant !Soit il le fait expr�s pour m'�nerver, soit il voit quelque chose d'invisible � mes yeux. C'est alors qu'un l�ger sifflement me parvient aux oreilles. Je me retourne lentement, regarde dans la m�me direction que lui , vers une roche aplatie , presque polie et � son sommet... Bon Dieu ! Un courant glacial parcourt tout mon corps tandis que deux yeux nous fixent. Les yeux d'un cobra. Je d�testais les araign�es mais les serpents , je n'avais jamais pens� en rencontrer un seul. Mauvaise pens�e, � l'�vidence. Le reptile se dresse comme un � i � et darde sa langue fourchue vers nous. Son sifflement se r�p�te inlassablement, je n'en peux plus ; j'imagine sans arr�t qu'il va prononcer mon nom ! � Sssstobbart �... quoi de plus charmant, apr�s tout ? Je sens de grosses gouttes de sueur couler de mon front et mouiller ma chemise. Cependant, ce n'est rien compar� � Andr� : il semble totalement paralys� par la peur, et, pour la premi�re fois, j'ai r�ellement piti� de lui . Aux derni�res nouvelles, je ne m'appelle pas encore Indiana jones. Mais que puis-je faire face � un cobra qui, pour couronner le tout, siffle de col�re ? Une col�re froide de cobra. On ne bouge pas , d'accord. Et apr�s ?
- George, regarde...
- Quoi ?
- Le cobra.
- Nooon ? Parce qu'il y a autre chose � regarder, peut-�tre ?
- On dirait...qu'il m�che.
En effet, le serpent gonfle la t�te par intermittence, comme s'il mastiquait, pour finalement nous d�voiler ses deux crochets luisants. Lorsque, venant de derri�re nous :
- George Stobbart ! Quelle bonne surprise !
Je me retourne le plus lentement possible pour me retrouver face � face avec...
- Duane Handerson ! Mais...que faites-vous en plein d�sert de Jordanie ?
- Tu connais Pearl, George. On lui a dit qu'ici, elle pourrait se procurer des objets datant du premier si�cle de notre �re.
Duane Handerson et Pearl, sa femme, �taient deux am�ricains � hors norme � qui parcouraient le globe � la recherche d'antiquit�s ou de quoi que ce soit qui aurait pu �pater leurs voisins. L'imperturbable sifflement me ram�ne � la r�alit� des choses.
- Duane, �coutez-moi. Il y a ici, dans mon dos, un immense cobra. Allez donc cherchez quelqu'un qui puisse nous en d�barrasser, s'il vous pla�t.
- Tout de suite, George.
Il s'engouffre dans le S�q pour en ressortir aussit�t accompagn� d'un garde, lequel garde s'approche lentement d'Andr�, par ailleurs toujours immobile, et de moi. Il va m�me jusqu'� nous d�passer, tire un couteau de sa gaine et le lance en direction du reptile qui, quelques secondes plus tard, s'effondre, mort. Notre sauveur se retourne vers nous, nous sourit et finit par nous dire quelque chose en arabe, � quoi nous r�pondons par un sourire de soulagement. Il repart en emportant son troph�e de chasse avec lui. Qu'il le garde ! Andr� ne bouge toujours pas mais maintenant qu'il n'y a plus de danger imm�diat, je ne vais certainement pas me fatiguer � l'aider � se relever. Faute de quoi, je me retourne vers Duane :
- Merci. Vous nous avez tir�s d'un sacr� p�trin.
- Je t'en prie, George. Dis-moi plut�t ce que tu fais dans ce trou perdu de la plan�te.
- En fait, je suis � la recherche d'une amie qui a,semble-t-il, �t� kidnapp�e.
- Oh, je vois. Et tu penses qu'elle s'est r�fugi�e ici, pas vrai ?
- Duane, elle a �t� enlev�e ! Elle n'est pas partie de son plein gr� sinon elle m'aurait pr�venu.
- En es-tu certain, George ?
- O� voulez-vous en venir ? Vous l'avez vue ?
- Possible... Pourrais-tu me la d�crire ?
- Brune, assez grande, mince et tr�s soupe au lait.
- Est-elle photographe ?
- Disons qu'elle conna�t bien le domaine de la photographie.
Situation pour le moins �trange ; d'habitude, c'est moi qui pose les questions.
- Va donc faire un tour du c�t� du Khazn�, George. C'est le plus grand et le plus ancien tombeau de cette ville, je pense que tu ne seras pas d��u. Bon, je vais te laisser, il faut que j'aille convaincre Pearl de partir.
- Bien...Merci pour tout, Duane.
Andr� se d�cide enfin � se relever et nous nous dirigeons en silence vers le Khazn�, dans la direction que Duane m'a indiqu�e avant de partir. Je sens mon coeur battre de plus en plus vite au fur et � mesure que nous approchons du tombeau. Le soleil est maintenant au z�nith et mes yeux sont presque aveugl�s par la lumi�re de l'astre de feu. Pourtant, au pied du Khazn�, j'entrevois une svelte silhouette qui a pour effet de nous faire acc�l�rer le pas. La silhouette se pr�cise pour bient�t appara�tre parfaitement nette � nos yeux et, contre toute attente...
- Nico !
Oui, c'est bien Nicole qui se tient l�, parfaitement libre et qui ne semble pas en revenir que nous soyons l�. La preuve:
- George ?!? Andr� ?!? Mais...que faites-vous ici ?
Nous nous regardons, Andr� et moi, ne sachant plus vraiment quoi penser et nous commen�ons � parler, juste assez fort pour qu'elle puisse nous entendre :
- George, que fait-on ?
- Que fait-on ? On va faire �quipe, pour une fois.
- Pourquoi ?
- POUR ENTENDRE DES EXPLICATIONS CLAIRES ET NETTES ! VOIL� POURQUOI ! J'AIMERAIS ENFIN COMPRENDRE CE QU'ON FICHE ICI, BON SANG !

Chapitre 7 : r�v�lations.

Le premier choc pass� et ma col�re tomb�e, je me pr�cipite, fou de joie et de soulagement, vers Nico qui ne semble toujours pas en revenir que nous soyons l�, Andr� et moi. Elle m'accueille cependant avec son plus beau sourire, lequel me pousse au comble du ravissement. Andr�, lui, devra se contenter d'une simple poign�e de main, ce qui n'est pas pour me d�plaire. Nous restons immobiles de longues minutes, nous d�visageant sans fin jusqu'� ce que nos rires respectifs �clatent pour se propager avec retentissement dans tout le S�q. Nico, qui para�t r�ellement s'amuser de nos v�tements, s'av�re �tre la premi�re � retrouver son s�rieux, nous demandant ainsi de faire de m�me. Apr�s quelques minutes, nous y parvenons enfin et Nico, souriante, se d�cide � prendre la parole, s'adressant � moi tout en guettant chaque crispation de muscle de mon visage :
- Et maintenant, George, peut-�tre pourrais-tu m'expliquer ce pourquoi vous �tes ici, Andr� et toi ?
- Nous ? Ce serait plut�t � toi de nous expliquer ce que tu fais l� et surtout, � quoi rime toute cette com�die !
- Une com�die ? Quelle com�die ? De quoi parles-tu ?
- Par exemple, du coup de t�l�phone que tu m'as pass� il y a deux jours...et du reste.
- Mais...je ne t'ai pas appel� par t�l�phone r�cemment ! Et qu'est-ce que tu entends par � le reste � ?
- Tu te moques de moi, n'est-ce pas ?
- Je te jure que non.
Je raconte donc toute l'histoire � Nico, du d�but � la fin, en essayant de n'omettre aucun d�tail, aussi petit soit-il. Elle m'�coute en silence, constern�e, suspendue � mes l�vres. La chaleur environnante nous enveloppe dans une sorte de torpeur consciente qui n'en est que plus insupportable encore. Nico me demande doucement de lui donner le message et l'anneau, les deux objets qui nous ont guid�s jusqu'ici. Je m'ex�cute. Elle les observe alternativement en silence, me rend l'anneau mais s'attarde sur le petit bout de papier. Les secondes me semblent interminables tandis que ses sourcils se froncent pour finalement arracher � sa bouche un petit cri d'exclamation trop longtemps contenu :
- George, je n'ai jamais �crit ce message ! Certes, c'est bien mon �criture qui est lisible dessus mais ce n'est pas moi qui l'aie �crit ! Je t'en avais laiss� un autre dans lequel je te faisais clairement savoir que je me trouvais en Jordanie pour un reportage � l'occasion du 192�me anniversaire de la re-d�couverte de cette ville par un explorateur suisse, Johan Ludwig Burckhardt, et que tu ne devais pas t'inqui�ter pour moi. Quant � cet anneau, je ne l'ai jamais vu auparavant, ni quoi que ce soit lui ressemblant.
- Donc, quelqu'un aurait imit� ton �criture. Je crois que je commence � comprendre...
- Pas moi. fait remarquer Andr�. Et pourtant, je me suis creus� la cervelle !
- Avec une cervelle creus�e, on peut difficilement r�fl�chir logiquement. Je vais vous expliquer : apr�s ton d�part, Nico, une personne quelconque, de toute �vidence une femme, s'introduit chez toi par effraction et...
- Pourquoi sp�cialement une femme ? me demande Nico.
- A cause de sa voix. La voix que j'ai entendue au t�l�phone, si ce n'�tait pas la tienne, c'�tait n�anmoins celle d'une femme. Donc, j'entends un cri f�minin � travers mon t�l�phone qui, par chance, localise les appels, et m'indique qu'il vient de toi. Cette femme sait pertinemment que, par inqui�tude pour toi, je vais arriver d'un moment � l'autre. Par cons�quent, j'en d�duis qu'elle a voulu m'attirer chez toi ; cependant, il ne lui reste pas beaucoup de temps : pour ajouter de la cr�dibilit� au tableau, elle massacre ton appartement. Elle lac�re gentiment et pr�cautionneusement le lit et le canap� � coups de couteaux, renverse les meubles et les papiers apr�s avoir, auparavant, imit� ton �criture � la perfection pour �crire ce message et remplacer le tien, qui m'aurait rassur�. D�lib�r�ment, elle le r�dige sous la forme d'une �nigme de telle sorte qu'� sa vue, mon inqui�tude s'accentue et que je tente de le d�chiffrer seul, en vain. Elle sait donc parfaitement qu'il me faudra un certain temps et que j'aurai besoin de l'aide d'un historien � cause de la date pr�sente sur le message, soit � 1812 �. Encore faut-il qu'il le trouve, cet historien, s'est-elle dit. Alors, comme elle sait aussi que, d�s lors, je ne vais pas l�cher prise, elle se d�p�che de quitter les lieux, satisfaite et persuad�e...Mais persuad�e de quoi ? Pour le moment, c'est encore un myst�re...
Toujours est-il que, j'arrive chez toi pour ne voir qu'un appartement en lambeaux. Et, bien �videmment, je crois que tu as �t� kidnapp�e. Je fouille donc les d�combres et trouve le message qui ne fait qu'accentuer mon inqui�tude. Mais il s'est pass� quelque chose � laquelle elle ne s'attendait pas : elle a perdu la petite bourse en cuir contenant l'anneau, lequel anneau nous a permis, � Andr� et moi, de comprendre bien plus vite que ce qu'elle avait pr�vu, l'�nigme. Le reste, vous le savez.
- Puissamment raisonn�, George. me f�licite Nico en souriant.
- Merci.
- Mais il y a quelque chose qui me chiffonne : pourquoi avoir �crit un autre message alors que le mien te faisait �galement savoir que je me trouvais en Jordanie ?
- C'est tr�s simple : ton message m'aurait rassur�, comme je te l'ai d�j� dit, et je ne serais pas venu ici...alors que le sien a suscit� mon inqui�tude � ton sujet et, par cons�quent, m'a en quelque sorte � oblig� �, de prendre le premier avion pour Amman pour partir � ta recherche.
- Ce qui veut dire, en clair ? me demande ironiquement Andr�.
- Ce qui veut dire, Andr�, que nous sommes bel et bien tomb�s dans son pi�ge : on a voulu nous attirer ici ! Pourquoi ? �a reste � d�couvrir...

Chapitre 8 : La descente des t�n�bres.

Nous attirer ici...Qui ? Pourquoi ? Cette histoire ne me dit rien qui vaille... Nico et Andr� bavardent maintenant en toute s�r�nit� tandis que le silence m'envahit, me d�stabilise, m'effraie. Tout cela n'est pas normal. Non, quelque chose de bien plus sombre se cache dans les t�n�bres, dans les profondeurs de la cit� rose. Quelque chose de malveillant, quelque chose de mal�fique...
Je l�ve les yeux et demeure sans voix : le site de Petra para�t irr�el tant sa beaut� est ahurissante ! Sous les rayons du soleil, le gr�s des falaises change de couleur ; d'abord blanches, ses veines s'animent brusquement pour rivaliser de tons diff�rents : rouge, rose, ocre, jaune et m�me noir. Le d�cor est on ne peut plus somptueux. D'�tranges corniches sculpt�es par l'eau et le vent se d�tachent des rochers alors que de rares arbres tentent de s'agripper aux parois de pierre. Et soudain, mes yeux se perdent dans la contemplation d'un monument absolument magnifique � la fa�ade rose : le Khazn�.
De longues minutes s'�coulent sans que je puisse prononcer un seul mot. J'�prouve une sorte de transe, d'extase : la fa�ade du monument, haute d'une quarantaine de m�tres, est polie. Il existe une harmonie parfaite entre les formes, une douceur infinie entre les teintes. C'est la voix de Nico qui me rappelle � la r�alit� des choses :
- George, r�veille-toi !
- Pardon ?
- Redescends sur Terre, George.
- Oui, tu as raison...dis-moi, puisque tu es l� depuis plus longtemps que nous, as-tu entendu quelque chose d'�trange � propos de cette ville ?
- Pas que je sache, d�sol�e.
- Tu en es s�re ? Rien de th�ologique, de l�gendaire ?
- En quoi cela pourrait-il nous aider ?
- Ah ! Donc, tu as bien entendu quelque chose !
- Oui, mais...
- Raconte !
- Puisque tu y tiens tant que �a...le Khazn� tire son nom arabe d'une ancienne l�gende selon laquelle une urne jadis d�pos�e au sommet de l'�difice renfermerait un tr�sor laiss� l� par un pharaon. D'o� le nom � Khazn� �, car il signifie � tr�sor � en arabe. On raconte que des B�douins ont tent� de s'emparer de ce tr�sor � l'aide de leurs armes � feu. Mais leurs salves n'ont r�ussi qu'� mutiler les reliefs. La l�gende narre �galement que l'urne en question serait � pr�sent cach�e quelque part dans l'enceinte gigantesque de Petra et que seule une � cl� de lumi�re � pourrait l'ouvrir pour en d�couvrir son �ventuel contenu.
C'est tout ce que je peux te dire...
- Une � cl� de lumi�re �...effectivement, c'est pour le moins �trange.
- Peux-tu maintenant m'expliquer pourquoi �a t'int�resses � ce point ? Tu te passionnes pour l'Histoire de la Jordanie, peut-�tre ?
- Ne sois pas stupide. Je cherche simplement � comprendre la raison pour laquelle nous nous trouvons ici.
- Tu penses r�ellement que nous sommes tomb�s dans un pi�ge ? D'ailleurs...
Mais je ne saurai sans doute jamais ce que Nico allait dire apr�s ce � d'ailleurs � car une voix interrompit notre conversation, � combien passionnante, en hurlant � qui voulait l'entendre :
- Approchez, amis touristes ! Approchez ! Venez visiter le Khazn�, le monument le plus pr�cieux de la cit� rose ! D�couvrez son atmosph�re unique au monde et laissez-vous envo�ter par le myst�re qui hante ces lieux depuis des �ges lointains... Nous nous regardons, Nico et moi, esquissons un sourire et rejoignons l'homme en question, apr�s avoir appel� Andr�.
L'homme nous conduit � l'int�rieur du Khazn� : il est orn� de deux colonnes d�gag�es, elles-m�mes orn�es de chapiteaux corinthiens � double rang�e de feuilles d'acanthe. La tholos, ou petit temple rond, est d�cor�e d'une Tych� qui tient dans sa main gauche une corne d'abondance. Deux Amazones dansent en faisant tournoyer des haches au-dessus de leur t�te. D�cid�ment, le Khazn� semble pr�senter beaucoup de parall�les avec la Gr�ce antique. La sobri�t� de l'int�rieur contraste avec la richesse du d�cor de la fa�ade. Aucun de nous ne parle, chacun est occup� � observer le moindre d�tail du temple. Le vestibule dans lequel nous nous trouvons donne acc�s � trois salles diff�rentes, creus�es dans le gr�s qui laisse appara�tre ses veines chatoyantes. Ces salles me remplissent brusquement de peur, je ne sais pas pourquoi. Le saurai-je un jour ? Quoi qu'il en soit, dans le silence le plus complet, nous p�n�trons dans la salle de droite. Il fait sombre. Instinctivement, nous nous rapprochons les uns les autres...Lorsque brusquement, un cri parvient � mes oreilles ! Ou plut�t des cris. Des cris de haine et de col�re ! Je n'ai pas le temps de r�aliser ce qui m'arrive et re�oit dans la p�nombre un coup violent sur ma nuque. Je titube...les t�n�bres descendent lentement et m'engloutissent peu � peu. Mes jambes ne me portent plus...je perds conscience de ce qui se passe autour de moi et tout n'est plus que nuit noire.

Chapitre 9 : Prisonniers de l'ombre.

Je reprends conscience, �tal� de tout mon long sur le sol dur et froid. J'�prouve un mal de t�te particuli�rement douloureux et je ne vois pas � trois m�tres devant moi. Ma vue est compl�tement floue. Je frissonne dans l'obscurit� et me rel�ve tant bien que mal en tentant de garder le plus de lucidit� possible...Je passe machinalement ma main dans mes cheveux avant de la retirer... rouge. Un filet de sang coule de mon front. Nos agresseurs n'y sont pas all�s de main morte ! Je n'ai pas la moindre id�e de l'endroit o� je me trouve mais une chose est certaine : je ne suis pas seul. Une respiration, lente et r�guli�re, me parvient aux oreilles avant qu'une voix s'�l�ve de la p�nombre :
- Salaam, ami ! Et soit le bienvenu en enfer.
- Qui �tes-vous ? Et o� donc vous trouvez-vous ? Je ne parviens pas � vous voir.
- Cela n'a rien d'�tonnant, ils t'ont drogu�. Ta vue devrait bient�t redevenir normale. Mon nom est Karim, pour te servir.
- George Stobbart. Pourquoi �tes-vous ici ?
- Pour la m�me raison que toi, je suppose. J'ai cherch� � comprendre ce qui se passait ici et je l'ai ch�rement pay�. Je suis enferm� dans cet endroit depuis longtemps, tr�s longtemps, trop longtemps. J'ai perdu la notion du temps, oubli� la lumi�re du soleil et celle de la lune pour ne plus conna�tre que l'ombre de cette salle.
- Vous n'avez jamais tent� de sortir ? Et comment avez-vous fait pour survivre ?
- J'ai bien �videmment essay� de m'�vader, cela est indiscutable. Mais toujours en vain et l'espoir m'a abandonn�...On ne peut pas sortir d'ici, serais-tu m�me un magicien. Je ne dois ma survie qu'au cours d'eau que tu peux entendre ainsi qu'� quelques racines riches en vitamines...
Karim se mure dans le silence. Sa silhouette d�charn�e t�moigne du temps qu'il a d� passer dans cette prison noire. Je m'assieds sur le sol et observe mon compagnon ( du moins ce que j'en vois ) sans un mot. Mes yeux se ferment tandis que le sang bat � mes tempes, me martelant la t�te. Un bruissement d'eau se fait entendre, tout doucement. Au moins, je ne mourrai pas de soif, c'est d�j� �a...
Combien de temps suis-je rest� ainsi, je ne saurai le dire. Mais � en juger par la temp�rature, la nuit doit � pr�sent �tre tomb�e. J'ai la gorge s�che, tarie, presque aride. Assoiff�, mes pas guid�s par mon ou�e, je trouve le cours d'eau et bois, inlassablement, de longues gorg�es. A cet endroit, seuls les murs et le plafond sont de pierre, tout le reste est recouvert de terre et de poussi�re. Je m'appr�te � me relever pour retourner aupr�s de Karim lorsque mon attention se trouve attir�e par le sol. J'y passe lentement mes doigts et ne peut retenir un cri de stup�faction ! Car ce sol qui, sous l'effet des multiples gouttes d'eau tomb�es de mes l�vres, aurait d� devenir boueux ou tout au moins mouill�, s'est au contraire creus� pour laisser appara�tre de tr�s minces cavit�s...

Chapitre 10 : D'o� l'importance de l'eau.

Fascin�, je r�it�re l'op�ration ; aucun doute possible, l'eau stagne dans de minuscules fissures de pierre. Karim, piqu� par la curiosit�, me rejoint pour rester fig� sur place face au ph�nom�ne. Il tremble de tous ses membres, comme s'il pensait �tre victime d'une hallucination mais, dans ses yeux, je per�ois une lueur d'espoir minuscule et gigantesque � la fois. Alors, comme des �perdus, anim�s par le d�sir irr�pressible de la libert�, nous nous pr�cipitons sur l'eau pour en asperger la terre. Peu � peu, d'autres fissures apparaissent et se mettent � converger en un m�me point, formant ainsi un cercle liquide.
Au centre de ce cercle, une pierre polie par l'Homme. Elle ne semble attendre qu'une seule et unique chose : �tre � actionn�e �. Ma main, tremblante, s'en approche, s'y appuie et, comme je m'y attendais, s'enfonce avec elle. Un d�clic se fait entendre. Dans un bruit sourd, des m�canismes et des rouages se font entendre, s'entrechoquent, se rencontrent, fusionnent sous le sol, t�moignant du g�nie des nabat�ens. Et au-dessus de nous, � une trentaine de m�tres de haut, une trappe rocheuse de forme circulaire s'ouvre lentement, laissant les rayons p�les de la lune percer violemment les t�n�bres qui nous entourent. Karim pousse un cri de joie :
- Allah soit remerci� ! De la lumi�re, enfin !
Mon compagnon m'appara�t comme un enfant qui aurait vieilli trop t�t, trop vite. Il est d'un �ge d�j� respectable, les traits fatigu�s de son visage en t�moignent. Mais le bonheur le submerge, il en pleure de gratitude, et, pouss� par une force extraordinaire, b�nit le ciel de l'avoir sorti de la p�nombre infinie de cet endroit. Quant � moi, je suis litt�ralement absorb� par le mur se trouvant en face de moi : le reflet des rayons de la lune sur l'eau y a form� une phrase ainsi qu'une �trange suite de lettres en relief qui scintillent sous mes yeux ahuris. Ces lettres peuvent s'enfoncer dans le mur. Voici ce que je peux lire :

� Ici est cach�e la cl� de ta libert�, la m�riter n'est pas gratuit. Les marches tu graviras lorsque le fils de Al-Uzzah le permettra. Pour r�ussir, ne t'y trompes pas, seul le 2 t'aidera. �
DAURSOHIAUREA

Le fils de Al-Uzzah ? Le chiffre 2 ? Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Je m'empresse d'appeler Karim qui, interloqu�, observe le mur puis se met � rire de bon coeur. Je l'interroge :
- Vous pourriez me dire ce qu'il y a de dr�le l�-dedans ?
- Connais-tu le nom du dieu principal des nabat�ens ?
- Oui. Il s'agit de D�shara, si mes souvenirs sont exacts.
- Tout � fait. D�shara n'est autre que le fils de Al-Uzzah et si tu ne lis qu'une lettre sur deux, tu verras appara�tre son nom. Je pense que ce sont uniquement ces lettres qu'il nous faut pousser...
- Si vous le dites...apr�s tout, nous n'avons rien � perdre !
Nous nous ex�cutons donc et, quelques secondes plus tard, le nom du dieu se trouve enfonc� dans le mur. Une d�tonation assourdissante retentit dans toute la salle et les murs se mettent � vibrer, d�clenchant de petits, mais nombreux, �boulements. Nous nous jetons � plat ventre et, pendant un long moment, les entrailles de la Terre semblent rugir de toutes leurs forces pour nous engloutir. Lorsque nous relevons les yeux vers la trappe circulaire, nous demeurons stup�faits ! A l'aide d'un gigantesque m�canisme, des marches se sont d�gag�es des murs, nous offrant une voie parfaitement s�re et libre pour, enfin, sortir des t�n�bres. Alors que nous gravissons les marches quatre � quatre, je me jure de ne plus jamais gaspiller de l'eau.

Chapitre 11 : � Promenade � au clair de lune.

Nous voici � pr�sent en hauteur mais o� pr�cis�ment, je n'en ai aucune id�e et Karim non plus apparemment. Devant nos yeux s'�tend toute l'immensit� et toute la magnificence de la cit� rose, qui para�t prendre vie et s'�veiller en douceur sous un ciel constell� d'innombrables �toiles. C'est une curieuse sensation que celle que j'�prouve...Cette ville abandonn�e depuis des si�cles pourtant si belle, si vivante. Les rares bruissements de feuilles, presque imperceptibles, qui me parviennent aux oreilles donnent � Petra une lente respiration, sereine et calme. Quel est donc cet endroit o� les morts parviennent � vivre dans l'�ge des falaises sculpt�es par la main de l'Homme ?
Et Nico...cette fois-ci, j'ai peine � croire qu'il s'agisse d'un coup de th��tre...et, � propos de th��tre...
Karim me montre du doigt un grand h�micycle, � plusieurs centaines de m�tres. Je me souviens des paroles de Monsieur Burckhardt, � Paris : � Petra poss�de ses boutiques, et ses �difices publics - th��tres, bains, fontaines - construits dans un large cirque. �Je crois que nous avons donc en face de nous le th��tre de la cit� rose. Nous entreprenons alors de nous y rendre, ce qui n'est pas chose ais�e vu la raideur de la pente.
Arriv�s sur place, nous nous accordons une courte pause. Karim, semble tellement heureux d'�tre sorti de cette prison qu'il en oublie sa fatigue. Je crois qu'il en est de m�me en ce qui me concerne.
Le th��tre poss�de trente-trois rangs de gradins taill�s dans un gr�s bigarr� d'une couleur dominante grise assez terne. A vue de nez, je dirais qu'ils pouvaient accueillir entre 3 000 et 4 000 spectateurs. Ces gradins se d�veloppent donc en demi-cercle en face d'un b�timent de sc�ne dont il ne reste que les fondations et quelques colonnes redress�es.
Il n'y a pas �me qui vive autour de nous. Enfin, presque pas...Karim et moi �changeons un regard � la fois surpris et inquiet : l�-bas, plus au sud-est, des voix nous parviennent aux oreilles, troublant ainsi le silence nocturne. Et pour couronner le tout, j'aper�ois la faible lueur dor�e de torches enflamm�es... Apr�s un moment d'h�sitation, nous nous remettons en marche, dans cette direction, sans oublier auparavant de jeter un dernier regard au monumental vestige d'une dramaturgie pass�e.
Et voil� que dans la paisible nuit s'�l�vent ces quelques paroles que nous entonnons � mi-voix : � Trois kilom�tres � pieds, �a use, �a use...Trois kilom�tres � pied... �

Chapitre 12 : Le Haut-lieu

Selon Karim, nous nous trouvons entre le Khazn� et le th��tre, � la sortie du S�q. Quelques m�tres plus loin, j'aper�ois un �criteau sur lequel sont inscrits les mots "High Place". Il nous indique un escalier (aux marches plut�t imposantes) qui semble mener au-dessus de l'embouchure du S�q. Nous nous y engageons tandis que les voix se rapprochent au fur et � mesure que nous avan�ons. Apr�s vingt-cinq minutes d'ascension pour le moins fatigante, nous faisons face � un ravin mais, n'�tant pas suicidaires, nous pr�f�rons nous engager sur la droite. Karim m'explique par la m�me occasion que nous nous situons actuellement sur le massif de Zibb Attuf.
Et voici que soudain, au beau milieu de nulle part, se dressent deux ob�lisques, hauts de six m�tres environ ! Ben voyons ! Comme si la Gr�ce ne suffisait pas, il faut aussi qu'il y ait des concordances avec l'Egypte ! D'ailleurs, contempler ces fl�ches de pierre �rig�es vers le ciel me fait penser aux monumentaux temples de Louxor et d'Abou Simbel.
C'est alors que Karim me fait signe de ne pas faire de bruit et de regarder en face de moi :
- Voici le madbah, George.
- Le quoi ?
- Le Haut-lieu. Sais-tu ce qu'est un Haut-lieu ?
- Oui, la traduction fran�aise de l'�criteau.
- Le madbah, ou Haut-lieu, est l'endroit o� se d�roulaient les sacrifices pratiqu�s par les Nabat�ens en offrande � leurs dieux. Nous sommes un peu trop �loign�s pour le voir clairement, mais plus loin, � quelques m�tres dici, se situe un triclinium dont les trois banquettes se trouvent respectivement au nord, � l'est et au sud. Mais observe plut�t ce qui s'y passe !
Suivant son conseil, je plisse mes yeux afin de tenter de mieux voir. Je demeure soudain sans voix ! Des hommes, pricipalement v�tus de noir se dirigent vers le dit triclinium tout en se tournant vers ce qui semble �tre un reposoir pour de "petites" statues. Nous nous approchons � pas de loups : je peux maintenant les d�nombrer. Il y a l� dix hommes habill�s de la m�me mani�re, plus une femme et autre homme, reconnaissable entre tous gr�ce � la queue de cheval qu'il porte...Nico ! Et Andr� ! Sur une place r�serv�e aux sacrifices...Le sang bat � mes tempes alors que je m'approche un peu plus, un courant glac� parcourant mon corps de haut en bas. Encore...plus pr�s...quelques m�tres de plus...
Karim tente de me rattraper ; trop tard. Le sol rocailleux s'est d�rob� sous mon poids et me voici en train de d�bouler comme une pierre en plein vers ce "meeting nocturne" ! Tandis que je t�te mes jambes endolories pour v�rifier que je ne me suis rien cass� (ce qui semble �tre le cas, Dieu merci), un des hommes s'est lev�, se dirigent lentement vers moi qui suis, par ailleurs, toujours au sol, s'arr�te devant moi et me d�viseage longuement de toute sa hauteur. Puis, souriant et me tendant sa main pour m'aider � me relever, il me d�clare tout simplement :
- Alhan wa salhan. Bienvenue, M. Stobbart. Nous ne vous attendions plus.

Chapitre 13 : Amis et ennemis.

L'homme qui m'a tendu sa main est calme, serein et parfaitement d�tendu. Son visage, brun et d'un �ge d�j� fort respectable, d�gage une sorte de halo de chaleur humaine, laquelle chaleur est toutefois perc�e par une froide brume d'inqui�tude. Mais il sourit.
Il me sourit tout en guidant mes pas vers le triclinium o� si�gent � pr�sent les onze autres personnes. Me souvenant tout � coup que Karim est rest� derri�re, je l'appelle et lui fait signe de nous rejoindre, ce qu'il ex�cute sans se faire prier davantage.
- Ma�tre, nous voici donc au nombre de quatorze.
Je me retourne pour faire face � un jeune gra�on au visage imberbe et aux yeux d'un noir de jais, brillants de leur sombre �clat � la lueur des torches enflam�es. Il s'adresse � mon myst�rieux guide qui s'empresse de lui r�pondre :
- En effet, Inuhar. Ce qui signifie, tu le sais, que tu vas devoir quitter quitter le triclinium puisque tu es le plus jeune d'entre nous.
- Pourquoi cela ?
J'avais pos� la question sur un ton intrigu�.
- Parce que c'est la coutume. Seules treize personnes peuvent si�ger ici. Certains l'assimilent au dernier repas de celui que vous appelez le Christ. C'est tout. Inuhar !
- Oui, ma�tre ?
- Tu ne resteras pas l� � ne rien faire. Je vais te confier une importante mission, t�che d'en �tre digne. Tu vas aller surveiller le Khazn� et, si quelque chose te para�t suspect ou mena�ant, viens imm�diatement nous en avertir.
- Bien, ma�tre.
- Maintenant, va.
Sur ces mots, Inuhar nous salue puis s'�loigne pour dispara�tre en courant, une ombre dans la nuit �toil�e.
- Prenez place aupr�s de vos compagnons, George.
- Qui �tes-vous ?
- Une chose � la fois, M. Stobbart. Asseyez-vous apr�s avoir vous �tre inclin� devant D�shara, sur le reposoir � b�tyles.
J'avais donc raison ! Un reposoir pour les pierres sacr�es des Nabat�ens...Apr�s tout, D�shara m�rite bien que je lui rende hommage, puisque son nom m'a fait sortir de cette prison noire. Je m'incline donc avec respect devant le dieu avant de rejoindre Nico et Andr�. Ils n'ont d'ailleurs pas souffl� un mot depuis mon arriv�e quelque peu brutale. Karim s'assied �galement. C'est alors que le ma�tre prend la parole :
- Apr�s des dizaines d'ann�es d'attente, voici finalement venu le temps de la Proph�tie Ancestrale. Je demande � chacun de vous de consid�rer nos h�tes et amis comme vous propres fr�res, � la fois de coeur et de sang, car leur aide nous sera infiniment pr�cieuse pour venir enfin � bout de nos ennemis.
A ces mots, toute l'assembl�e baisse la t�te devant nous (c'est � dire Andr�, Nico et moi) pour nous saluer. Nous ne savons comment r�agir ni quoi penser. Puis, notre interlocuteur s'appr�te de nouveau � parler :
- Il est � pr�sent temps que vous sachiez pourquoi vous vous trouvez en ces lieux. Mais tout d'abord, vous qui �tes nos invit�s, veuillez servir le repas � chacun d'entre nous. C'est une coutume que vous vous devez de respecter. Quant � toi, Karim, sache que je suis combl� de joie de te revoir vivant.
- Merci, ma�tre.
Nico, Andr� et moi, parfaitement ahuris, commen�ons donc � distribuer les vivres � chacun sans chercher � comprendre quoi que ce soit. Sit�t fait, nous reprenons place en silence et attendons patiemment. Car enfin, qui sont nos amis et nos ennemis ?
- Je suppose, M. Stobbart, que votre curiosit� n'est en rien satisfaite, n'est-ce pas ?
- En effet. Je ne sais si je dois vous faire confiance, bien que je le souhaite ardemment.
- Bien s�r. Je r�pondrai � chacune de vos questions, ne craignez rien. - Merci. Pour commencer, qui �tes-vous ?
- Une bonne question m�rite une bonne r�ponse : nous sommes ce qu'il conviendrait d'appeler "les Fils de D�shara". En d'autres termes, nous formons un ordre secret ayant pour but de contrer les desseins mal�fiques de nos ennemis.
- Qui sont vos ennemis et que veulent-ils ?
- Nul ne sait qui ils sont exactement. Ou plut�t, nul ne conna�t celui qui les m�ne. La plupart sont de pauvres gens qu'il a �t� facile de recruter contre quelque argent et la promesse d'une vie meilleure. D'autres, en revanche, sont des soldats exp�riment�s, ou encore des terroristes. Tous sont assoif�s de pouvoir et s'il leur faut tuer pour obtenir ce qu'ils d�sirent, sachez qu'ils n'h�sitent pas une seule seconde. Ils ob�issent aveugl�ment aux ordres de leur ma�tre sans poser de questions. Ils n'ont pas de conscience et, pour finir, les voir �prouver le centi�me d'un sentiment d'humanit� serait un v�ritable miracle.
- Mais quel est leur but ?
- Leur ma�tre convoite un pouvoir...un pouvoir titanesque. Le Pouvoir des Dieux. Si cette force venait � �tre lib�r�e, de gigantesques tremblements de terre secouraient toute la surface du globe jusqu'� creuser une crevasse qui engloutirait absolument tout sur son passage. Villes, humains, b�tes, for�ts, lacs, d�serts, oc�ans dispara�traient pour l'�ternit� !
- Pour qui me prenez-vous donc ? J'ai peut-�tre vu beaucoup de choses surprenantes, mais un cataclysme pareil n'a jamais eu lieu ! Or, si ce pouvoir existe, comment se fait-il que personne n'ait r�ussi � s'en emparer � ce jour ?
- Nous avons prot�g� le Pouvoir des Dieux. Mais le nombre de nos ennemis n'a plus cess� de cro�tre au cours des derni�res ann�es, nous obligeant ainsi � nous retirer et � vivre dans les ruines de la cit� rose. Par bonheur, il leur manque toujours quelque chose...C'est cela qui les emp�che de briser les cha�nes du Pouvoir.
- Et quelle est cette chose ?
- Une Cl� de lumi�re.
- LA Cl� de lumi�re ?!?
C'est Nico qui avait prononc� ces mots.
- Exactement, Mlle. collard. La Cle de lumi�re dont parle la l�gende. Pour d�cha�ner le Pouvoir des Dieux, il faut poss�der cette Cl�.
- Mais que venons-nous faire l�-dedans ?
- Vous ne l'avez pas compris ? Vous devez tous trois parvenir � trouver la Cl� avant nos ennemis et les emp�cher ainsi de r�aliser leur dessein.
- Mais pourquoi NOUS ?
- Parce que votre ami, George Stobbart, poss�de l'Anneau de Salim.
Je reprends la parole :
- Et alors ?
- L'anneau de Salim est la marque de l'Elu. vous ne pouvez vous d�rober � cette qu�te, il s'agit de votre destin. De plus, l'Anneau poss�de �galement un pouvoir en rapport avec la Cl�, mais j'ignore lequel.
- Donc, les hommes qui nous ont attaqu� dans le Khazn� �taient...
- Nos ennemis. Nous sommes intervenus � temps pour sortir M. Lobineau et Mlle. Collard de leurs griffes, mais ils ont r�ussi � vous emmener.
- Mais l'Anneau...je ne le poss�de plus !
- Mlle. collard vous l'a arrach� par m�garde lors de cette embuscade. Le voici.
Il me tend la petite bourse en cuir contenant l'Anneau de Salim. Je m'en saisis tout en regardant mon interlocuteur au plus profond de ses yeux.
- Eh bien, M. Stobbart, il semble que vous connaissiez � pr�sent vos amis et vos ennemis : �`a. Faites attention.

Chapitre 14 : La folie commence.

Le jour se l�ve avec magnificence, le soleil baignant peu � peu Petra d'une douce lumi�re rose. C'est sans doute l'un des plus beaux levers de soleil que j'aie jamais contempl�. La veille, apr�s notre entretien mouvement�, nous sommes tous all�s dormir d'un pas lourd et �puis�. Mais mon sommeil restait particuli�rement agit�.
"Faites attention"...Je ne sais pas pourquoi mais j'ai comme l'impression que nous nous sommes tous embourb�s dans un sapr�...bourbier. Le Pouvoir des Dieux, une Cl� de Lumi�re, la destruction du Monde !!! Pourquoi pas l'Apocalypse pendant qu'on y est ?
Le Chef des Fils de D�shara a dit se pr�nommer Medjal...C'est un homme droit en qui nous pouvons avoir confiance, nous le savons tous trois. Lorsqu'il m'a tendu l'Anneau de Salim, j'ai senti un poids colossal s'abattre sur mon �me. Qui suis-je pour m'enqu�rir d'une telle mission ? Un fou, sans l'ombre d'un doute. Qu'importe ! Nous ne pouvons plus reculer � pr�sent. Mais par o� commencer nos recherches pour retrouver la Cl� de Lumi�re ? La cit� rose est immense, autant chercher une aiguille dans une botte de foin.
- George ?
Nico m'avait rejoint. Elle semblait avoir mieux dormi que moi. Elle me fit d'ailleurs remarquer combien j'avais boug� durant mon sommeil. Elle rit :
- Un v�ritable boucan !
- Pas autant que Karim...il ronfle comme un bulldozer !
- Ou comme une locomotive...Tu penses qu'on peut lui faire confiance ?
- Indubitablement. Il est l'un des Fils de D�shara, et ce sont nos alli�s. Mais je ne sais par o� commencer nos recherches.
- Moi, je pense le savoir.
Nous nous retournons tous deux : c'est Andr� qui a prononc� ces mots. Mais son visage attire mon attention : il est p�le comme celui d'un mort, ses yeux sont rougis et ses joues plus creuses qu'� l'accoutum�e. Et, �trangement, je m'en inqui�te :
- Andr� ? Tu es s�r que �a va ?
- Oui, merci, George. Pour trouver la Cl�, il faut que nous retournions � Paris.
- Je suis dispos� � te croire mais pourrais-tu t'expliquer ?
- R�fl�chis, George. Il n'y a qu'une personne susceptible de nous aider et cette personne est...
- Burckardt !
- Exactement. Et j'ai mieux : je viens de me souvenir que M. Burckardt n'est en rien le descendant de Johan Ludwig Burckardt ! Il porte le m�me nom mais rien de plus. Je me souviens m�me qu'il avait suivi un traitement psychiatrique pour qu'il se d�fasse de cette id�e. Et cela avait fonctionn�. Or, il s'est pr�sent� � toi comme �tant de nouveau son descendant...Cette rechute ne peut s'expliquer que par un fort choc �motionnel. Je ne m'en suis pas aper�u avant mais pour moi, une chose est claire : il n'a pas l'esprit tranquille.
- Nom de nom ! Filons pr�venir Medjal !
Aussit�t dit, aussit�t fait. Nous nous pr�cipitons vers le Haut-Lieu et r�sumons la situation � Medjal. Celui-ci nous approuve et, pour que nous puissions partir au plus vite, nous fait escorter par le jeune Inuhar jusqu'aux portes de la cit� rose par un chemin d�rob�. L�, au bas des rochers, Mohamed nous attend toujours. Inuhar nous salue apr�s nous avoir souhait� bonne chance puis se s�pare de nous. Nous d�valons la pente et, juste le temps d'expliquer � notre ami que nous n'avons pas le temps de tra�ner, nous montons en selle pour repartir � Amman. Etant donn� que Nico n'�tais pas tr�s rassur�e � l'id�e de monter � cheval (Andr� avait fait des progr�s fulgurants), Mohamed la prit en croupe...pas de chance pour nous, Andr�.
Arriv�s dans la capitale jordanienne, nous prenons cong� de Mohamed qui ne nous fait rien payer (car il fait lui aussi partie des Fils de D�shara, nous l'avons appris sur le chemin du retour) en guise d'au-revoir. J'insiste, ne me souvenant que trop bien de sa nombreuse famille, sur la rive du d�sert. Il me remet un bracelet de cuir orn� de motifs arabes, symbole, selon lui, d'amiti� sinc�re. Je m'en pare avant de filer prendre nos billets pour Paris. Ce faisant, je m'approche d'Andr� et lui murmure � l'oreille :"Bravo, tu as �t� g�nial sur ce coup." J'ai droit � un sourire en retour. Apr�s tout, on est tous dans le m�me p�trin ; autant se serrer les coudes.
Nous arrivons � Paris deux jours plus tard, dans l'apr�s-midi. Le vol nous a sembl� durer une �ternit�. Bien qu'ext�nu�s, nous nous ruons chez M. Burckardt, guid�s par Andr�, � travers les d�dales de la Ville Lumi�re. Mais l�, un triste spectacle nous attend : l'historien est �tal� en travers du tapis du salon, de long en large, baignant dans une mare de sang, le corps transperc� par un tisonnier et le cr�ne fendu par le rebord de la chemin�e. Ses yeux sont ouverts, terrifi�s, mais sans vie. Voil� le premier mort de cette histoire...pensez � ouvrir le livre de comptes...

Chapitre 15 : Une chevali�re.

Nous nous ab�mons dans un silence de mort (ce qui para�t normal vu les circonstances) tandis que M. Burckardt nous fixe de ses pupilles noires, glac�es, o� toute vie semble avoir �t� absorb�e par le n�ant. Nous sommes arriv�s trop tard...mais de peu ! En effet, le corps du malheureux n'est pas encore parfaitement raide, ce qui signifie que sa mort ne doit pas remonter � bien longtemps.
J'entreprends de fouiller le cadavre apr�s m'�tre pr�cautionneusement couvert les mains de mouchoirs pour ne pas laisser d'empreintes. Il �tait � pr�sent absolument interdit de faire le moindre faux pas et, pour cela, nous n'�tions pas trop de trois. M. Burckardt n'avait rien sur lui, � proprement parler. Mais la chevali�re visible � son index droit attira mon attention : elle portait en son centre la repr�sentation minutieuse d'un "P" encastr� dans un "D". Sans doute cette chevali�re avait-elle une signification particuli�re..."P" comme P�tra et "D" comme D�shara, par exemple. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai comme l'impression qu'elle pourrait nous servir dans cette maison. C'est pourquoi je m'en empare doucement, la nettoie � l'aide d'un autre mouchoir puis la met dans ma poche en attendant la suite. Nico et Andr� n'ont rien perdu de la sc�ne m�me s'ils n'ont souffl� mot. Je me redresse puis me retourne vers eux :
- Cherchez, dans cette maison, le moindre symbole qui puisse ressembler de pr�s ou de loin � celui de cette bague. Fouillez tout de fond en comble !
- Ok, George, me r�plique Nico. Je m'occupe de la biblioth�que.
- Moi, poursuit Andr�, je prends d'assaut le hall d'entr�e. Et toi, George ?
- Je me charge du salon. Allons-y !
C'est ainsi que chacun de nous se met � fouiner dans chaque recoin, inspectant chaque mur, chaque porte et chaque meuble. Tout � coup, je sursaute : un carillon s'est mis � sonner. Je me retourne pour faire face � une horloge produisant le m�me son que Big Ben. Je tente de freiner les battements de mon coeur quand, enfin, Nico nous appelle :
- George ! Andr� ! Venez vite !
Nous nous pr�cipitons dans la biblioth�que. L�, au beau milieu des colossales �tag�res, Nico nous montre l'int�rieur d'une chemin�e dans laquelle un feu gronde, crachant ses flammes rougeoyantes. Nous nous approchons prudemment. Et, admirablement dissimul� par la noirceur du mur, le m�me symbole que celui de la chevali�re (et de la m�me taille) se dessine lorsque les languettes de flammes viennent le l�cher. C'est � ce moment pr�cis que des sir�nes de police se mettent � retentir quelque part au-dehors. La sueur se met � couler de nos fronts : si jamais on nous trouve ici, nous sommes fichus. Je cherche instinctivement quelque �chappatoire, une cachette, n'importe quoi, mais qui puisse nous dissimuler. Rien ! Absolument RIEN !!! Et ce symbole ! Comment l'atteindre avec ce mur de flammes ? L'�teindre prendrait beaucoup trop de temps ! Il nous faut trouver un autre moyen, mais lequel ? D�j�, les sir�nes se rapprochent. Nico est immobile, Andr� marche � reculons vers une statue repr�sentant la d�esse Isis, il me semble, alors que je suis � court d'id�es. Les sir�nes se rapprochent encore de plus en plus et les voitures auxquelles elles appartiennent ne doivent se trouver qu'� une dizaine de m�tres d'ici...Foutu. Tout est foutu.
- Andr� ! Attention !
C'est Nico qui a cri�. Je me retourne : Andr�, qui n'avait pas cess� de reculer, venait de percuter le signe Ankh d'Isis. Pendant une fraction de seconde, la statue divine chancelle, pr�te � aller s'effondrer sur Andr�. Mais, bien au contraire, elle se replace d'elle-m�me sur le socle qui lui est r�serv� tandis qu'un d�clic se fait entendre. Nouveau demi-tour :
- INCROYABLE !!! Regardez �a !
Le feu de la chemin�e ne ronfle plus comme auparavant, il est en train de se faire aspirer par une trappe que seul le signe Ankh peut avoir actionn�e. L'acc�s au mur int�rieur est libre, le symbole aussi. Nous nous ruons vers lui : j'applique avec pr�caution la chevali�re sur la paroi. Un lourd m�canisme se fait entendre, juste derri�re, et, enfin, le fond de la chemin�e se soul�ve, d�couvrant un escalier �clair� par des torches. Nous nous y engageons aussi vite que possible ; le passage se referme derri�re nous. Il �tait temps : les voix des policiers sont maintenant parfaitement audibles. Nous descendons les marches de granit, nos pas r�sonnant sur chacune d'entre elles...

A SUIVRE...

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� Binta 2003-2005