Simon_ASA a écrit :Je ne suis pas sûr que le précalculé permette de faire ça avec moins d'efforts, ce sont 2 techniques différentes avec chacune leurs avantages et leurs inconvénients/difficultés.
Il y a plein de facteurs à prendre en compte, l'évolution des technologies et des ordinateurs, des moteurs 3D, l'évolution des gouts et des attentes des joueurs.
Avec du précalculé on est forcément limité en framerate (des séquences animées en PNG sont longues à charger, donc on limite le nombre d'images pendant les animations), ou par le poids du jeu (les vidéos ont vite tendance à devenir très très lourdes).
Tu as raison, ce sont deux technologies complètement différentes, dans leur principe et leur mise en place.
Les gouts et les attentes des joueurs lambda ont largement été façonné par l'industrie du JV dans un processus assez inévitable lié à notre modèle de société, comme ce fût le cas pour le cinéma ou la musique. Cette même industrie a délaissé il y a longtemps la 3D pré-calculée. Effectivement, et j'en avais peu conscience hier, cette technique n'a en fait quasiment pas évolué depuis ses derniers éclats il y a 10 ans, et vit surtout comme tu l'as précisé, à travers les productions indépendantes.
Mais je pense justement que l'on a aujourd'hui tous les outils pour la faire évoluer vers un autre standard au niveau indé même. Par exemple, en ce qui concerne le rendu et le poids des vidéos, il existe maintenant des codecs avec une compression de plus en plus puissante, mais conservant une certaine qualité de l'image. Le H265 notamment, va devenir - je pense - le nouveau standard comme format de lecture dans les prochaines années (nécessaire avec l'arrivée du 4k). Le calcul des images/frames reste pour l'instant le vrai problème, puisque les définitions ont évolué en même temps que le matériel du grand public. Hier, du 640x480, aujourd'hui du HD ...
Simon_ASA a écrit :En plus, avoir un jeu en 3D temps réel entièrement jouable à la souris permettrait de tourner la tête même pendant les déplacements, ce qui n'est pas possible en précalculé justement.
Au temps pour moi, je n'avais pas saisi cette dimension dans ta description plus haut (le fait que tu souhaites bouger la tête pendant les déplacements). J'aimais bien pouvoir balayer une scène du regard pendant les cinématiques de Myst 3, même si on ne se déplaçait pas. Cela serait peut-être possible en rendant un cube de 6 images par frame, mais le processus serait extrêmement lourd. Cependant, je n'ose imaginer un tel rendu !
Simon_ASA a écrit :Je suis entièrement d'accord, beaucoup de ces jeux manquent d'identité. Mais ce n'est pas uniquement dans les graphismes/designs que je le ressens personnellement, c'est aussi dans le gameplay. Avancer au clavier dans ces jeux est à mon sens trop nerveux : on sent que c'est prévu pour aller vite, pour de l'action. Du coup, soit on marche mais c'est vraiment trop lent pour le coup, soit on court et là ça va trop vite. Je pense que des jeux d'aventure ont besoin d'un gameplay précis, qui n'est à ce jour pas représenté.
J'ai le même sentiment vis-à-vis du gameplay, mais tes mots mettent le doigt sur ce que je n'avais jamais réussi à définir. En quelque sorte, dans des jeux comme Dear Esther par exemple, je ne me suis jamais vraiment senti "dans mes pompes" dans la manière de se déplacer. On ressent quelque chose d'imposé et de déphasé du rythme posé par l'atmosphère du jeu. Paradoxalement, progresser de tableaux en tableaux par clic amenuise cette sensation justement parce que cela évite de s'y confronter. Mais il reste effectivement un gameplay hybride à inventer.
Simon_ASA a écrit :C'est sans doute parce que c'est cher à produire, pour un succès assez limité finalement. Pour afficher les déplacements, il faut calculer toutes les images (25 images par seconde pour l'oeil, ça fait beaucoup d'images à calculer pour un jeu complet), et en 3D c'est très long (de l'ordre de 5 à 20 minutes de temps de calcul par image). Faites le calcul : pour 1 minute de déplacement, il faut déjà 250+ heures de calcul ! (sauf erreur de ma part). Ca nécessite du budget pour avoir plusieurs grosses machines puissantes qui se répartissent la tâche.
C'est tellement vrai. Je sais que chez Cryo (avec les ordinateurs du milieu des années 90), une nuit complète était parfois nécessaire pour calculer une seule image sur un ordinateur. Riven n'a jamais connu de version en définition supérieure à l'originale, simplement parce qu'il faudrait rendre à nouveau toutes les images du jeu, ce qui constitue un travail de titan (et archéologique pour celui qui va mettre son nez dans les sources du jeu)
Simon_ASA a écrit :Il y a aussi des personnes qui n'aiment pas ces déplacements, car ça leur donnent l'impression de perdre leur temps en jeu, alors qu'en image par image on peut se déplacer très vite d'un point à un autre.
Il y en a sans doute, mais s'il y a une chose de vrai avec la plupart des Myst-like, c'est qu'on a très vite tendance à perdre son sens de l'orientation entre deux tableaux à proximité immédiate. Qui n'est jamais revenu sur ses pas par inadvertance ? Pour cette raison, j'ai toujours aimé le fait d'avoir l'animation d'un déplacement. Cependant, le contraire peut-être souhaité et non contraint. Là-dessus, je suis complètement en accord avec tes propos suivant :
Simon_ASA a écrit :Pour ma part, j'aime et je préfère les jeux précalculés, je l'ai expliqué dans plein d'articles et forums : je trouve qu'ils ont beaucoup plus de charme car c'est l'auteur lui même qui choisit les plans, les angles de vue. Comme un réalisateur derrière sa caméra, ou un photographe. Le côté image par image ne me dérangeait d'ailleurs pas dans ces jeux là, car c'était comme regarder un album photo plein de souvenirs. Et le plus gros avantage, c'est que ça laisse une place énorme à l'imaginaire ! Ne pas voir le déplacement entre 2 images, cela oblige le cerveau à reconstituer la partie manquante. Et là, le jeu prend un sens très émotionnel selon la personne. C'est comme lire un livre : beaucoup diront que c'est nul, qu'il n'y a pas d'images... Et pourtant, combien de personnes ont été déçues par l'adaptation cinéma de leur roman favori ?
Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils avaient fait leur film dans leur tête, et c'est un peu pareil avec les jeux diaporama !
C'est l'origine même du jeu d'aventure, et du jeu à narration tout court. On devait entièrement imaginer ou extrapoler les environnements à partir de la description textuelle ou extrêmement schématique qui nous en était faite (Zork, A Mind Forever Voyaging ...). L'approche de l'interaction était différente par rapport aux JA graphiques.
Dans les Myst-like, je ne peux m'empêcher d'imaginer ce qu'il y a au-delà des montagnes, du brouillard, d'une forêt et qui n'est pas représenté : on construit soi-même le reste de l'univers du jeu sans avoir jamais l'impression d'être confronté à sa nature virtuelle justement. Mais le plus souvent, j'imagine simplement qu'il y a quelque chose au delà, sans forcément le représenter, et c'est cette sensation que je trouve la plus grisante dans un jeu d'aventure. Paradoxalement, le joueur est pourtant très contraint dans ce genre au niveau des déplacements, mais cela ne se ressent pas tellement parce que la question des "barrières" est contournée par des subterfuges inhérents aux codes du JA. Un peu comme dans la vie d'ailleurs.
Dans des JDR comme Oblivion ou Skyrim de la série des Elder Scrolls, dont un des objectifs est de procurer une grande sensation de liberté, on se ramasse les limites et la virtualité du jeu de plein fouet quand une barrière invisible et un message indique qu'on ne peut pas "aller par là" (si l'on tente de sortir de la carte du jeu).
De ce fait, je rejoins tout à fait ton opinion sur le point de vue de l'auteur dans le jeu vidéo. C'est quelque chose de fondamental qu'on a trop peu pris en compte dans notre fascination pour l'exploit technologique.
C'est parce que les tableaux de Myst possède un point de vue que la première version me semblera toujours la plus forte. Par identification, le regard du concepteur devient le notre. Avec le temps réel, on a pensé déléguer ce point de vue au joueur avec l'idée de lui faire éprouver une plus grande sensation de liberté. Mais ça ne fonctionne pas avec tous les jeux (la faute à l'écriture et/ou au design des environnements).
Pour rester dans les JA, j'ai trouvé dans Gabriel Knight 3 une des rares tentative d'envisager la narration et la place du point de vue du joueur par rapport à son avatar. Certes, on y dirige Gabriel ou Grace (dans des environnements totalement en temps réel), mais on peut aussi faire absolument ce que l'on veut avec la caméra, à tel point qu'elle permet en quelque sorte la présence d'un regard désincarné. Elle s'adapte à son environnement, ce qui empêche de l'interpréter comme une simple caméra logiciel. À ce titre et pour d'autres raisons, GK3 fait partie des jeux dans lesquels j'ai éprouvé une des plus importante sensation de liberté de ma vie de joueur.